- Rappel du Contexte
La République de Guinée traverse une crise sociopolitique et économique qui la plonge et la maintient dans une instabilité profonde depuis plus d’une décennie.
Après l’avènement du multipartisme intégral suite à l’adoption de la Loi fondamentale du 23 Décembre 1990, le pays s’est doté d’institutions démocratiques dont l’objectif était de créer les conditions indispensables à l’instauration d’un Etat de Droit caractérisé par un équilibre réel entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.
Malheureusement, tous les pouvoirs qui se sont succédé ont eu pour caractéristiques : Injustice, Impunité, Corruption, gabegie financière, fraudes électorales, ethno stratégie, violations des droits de l’Homme, politisation de l’administration, instrumentalisation de l’armée et de la justice…
Confrontée aux défis de la stabilité institutionnelle compromettant le processus de développement économique et social du pays, la Guinée peine à entrer dans les concerts des Etats démocratiques à cause de l’absence d’une véritable alternance au sommet de l’Etat.
Arrivé au pouvoir en 2010, Mr Alpha Condé considéré par beaucoup d’observateurs comme un homme politique ayant lutté pour la démocratie plusieurs décennies, brisera tous les espoirs placés en sa personne.
A l’image de Lansana Conté, il se laissera emporté par des appels venant d’opportunistes au changement de l’ordre constitutionnel ce, malgré toutes les interpellations.
Pour rappel, depuis le 3 Avril 2019, des guinéens se sont retrouvés pour mettre en place un Front pour empêcher Mr Alpha Condé de succomber aux sirènes révisionnistes comme lui avait rappelé l’ancien Président de la Cour Constitutionnelle, feu Monsieur Kelefa Sall.
Face à cette opposition, Mr Alpha Condé et son régime utiliseront les moyens de répression à sa disposition pour tuer, arrêter, emprisonner, violenter et de détruire les biens de paisibles citoyens qui n’exerçaient que leurs Droits de résistance contre l’oppression.
Elu en 2021 après une élection chaotique et exsangue, Mr Alpha Condé rêvait de diriger la Guinée à vie dans le mépris total de ses concitoyens.
Le 5 Septembre 2021, les guinéens ont assisté à la fin du régime antidémocratique de Mr. Alpha Condé suite aux affrontements entre les éléments des forces spéciales et la garde présidentielle.
Si cette situation qui a conduit à la chute de Mr Alpha Condé a réjoui les démocrates guinéens, l’arrivée des nouvelles autorités à la tête du pays sous l’appellation du Comité National pour le Rassemblement et le Développement (CNRD) place le pays dans une période d’exception qui doit déboucher à une transition démocratique et apaisée.
En tant qu’organisations de la société civile fortement attachées aux valeurs et principes démocratiques, nous appelons le Comité National pour le Rassemblement et le Développement à poser les bases d’une transition inclusive et démocratique.
Pour ce faire, nous appelons la nouvelle équipe dirigeante du pays à s’occuper des chantiers de la transition qui devront favoriser la refondation d’un Nouvel Etat.
- Défis de la transition
- Refondation de l’Etat
Au regard de l’échec des différents rendez-vous manqués dans l’histoire récente de la Guinée, les nouvelles autorités de la Transition se doivent de tirer les leçons des causes de l’échec du pouvoir déchu de Mr Alpha Condé.
Les futurs organes de la transition doivent travailler sur un modèle politique qui prendra en compte l’expérience récente que notre pays a vécu dans le respect des droits et libertés de tous les citoyens sans exclusion aucune.
L’Etat qui naîtra après la transition doit placer l’intérêt du citoyen au cœur de la gouvernance et « la justice doit être la boussole qui guidera les guinéens » comme l’a souligné le Colonel Mamady Doumbouya lors de l’annonce de la prise du pouvoir par le Comité National pour le Rassemblement et le Développement le 5 Septembre 2021.
- Chantiers de la Transition
Pour éviter à notre pays la répétition des erreurs commises pendant la transition démocratique de 2010, les autorités actuelles en concertation avec l’ensemble des composantes sociopolitiques et avec l’aide de la communauté internationale se doivent de poser les actions suivantes :
- Rédaction et validation d’une Charte de la transition
Comme dans tous les pays en situation d’exception, le retour à l’ordre constitutionnel par la mise en place d’Institutions démocratiques doit être la priorité parmi les priorités. Le Comité National pour le Rassemblement et le Développement ne devrait pas nourrir un programme de réformes ambitieux.
- Formation d’un Gouvernement Inclusif
La mise en place d’un gouvernement inclusif de transition avec un nombre ne dépassant pas 25 personnes doit obéir à des critères tels que la compétence, l’intégrité et l’expérience.
En outre, le retour de tous les fossoyeurs de l’économie nationale et de personnes physiques ayant soutenu le coup d’Etat constitutionnel de mars 2020 contribuerait à fragiliser la future équipe gouvernementale et écorner son image vis-à-vis de l’opinion nationale et internationale.
- Mise en Place du Comité National de la Transition
En tant qu’organe constituant et ayant un pouvoir législatif, il est plus que nécessaire de doter le pays pendant cette période d’un Comité National de Transition composé d’hommes et de femmes compétents et intègres pour s’occuper du toilettage des textes comme la Constitution, le code électoral et certaines lois organiques comme celles portant sur la Commission Electorale Nationale Indépendante, la Cour Constitutionnelle, l’Institution Nationale Indépendante des droits humains, la Haute Cour de Justice…
De préférence, le Comité National pour la Transition ne devrait pas comporter une pléthore de personnes car l’inclusion ne doit pas être assimilée au contentement.
- Organisation d’un Référendum
Le peuple de Guinée doit en cette période d’exception être placée au centre des préoccupations des autorités actuelles du pays.
Une fois la future constitution rédigée par le Comité National de Transition, celle-ci doit être soumise à un vote par référendum en vue de son adoption afin qu’elle soit l’émanation du peuple souverain de Guinée qui aura le droit de s’opposer à son changement sous l’autel d’ambitions démesurées du pouvoir.
- Organisation du référendum avec un couplage des élections législatives et Présidentielle
Afin de réduire le temps et les coûts nécessaires à la fin de la transition, une organisation couplée des élections législatives et présidentielle devrait être envisagée pour permettre un retour rapide à l’ordre constitutionnel après l’adoption de la future constitution par voie référendaire.
Pendant ces rendez-vous électoraux, les candidats issus des partis politiques et des listes indépendantes doivent être des guinéens qui n’ont pas participé ouvertement au changement constitutionnel du 22 Mars 2020.
- Du Délai de la transition
Nos Organisations proposent que la durée de la transition n’excède pas un délai de 18 mois
- Attitudes et Conduite des acteurs de la transition
Pour que la transition qui s’ouvre en Guinée réussisse, les membres du Comité National pour le Rassemblement et le Développement, du Gouvernement et du Comité National de la Transition doivent :
- Observer une stricte neutralité
- Déclarer leurs biens lors de leurs prises de fonction et à la sortie
- Des Actions Urgentes à entreprendre
Les autorités de la Transition se doivent en cette période d’exception garantir le respect de toutes les libertés individuelles et collectives dévolues aux citoyens, assurer la sécurité des personnes et leurs biens, la traduction de tous les présumés auteurs des crimes de sang et de détournements de fonds publics devant les tribunaux, dédommager les victimes de violations des droits de l’Homme, toiletter le fichier électoral
- Conclusion
La République de Guinée fait face à un autre rendez-vous de l’histoire qui déterminera son avenir et celui de ses citoyens.
Face aux défis actuels, les autorités actuelles du pays n’ont pas le droit à l’erreur et doivent apprendre des précédents régimes pour cette fois-ci sortir la Guinée de l’instabilité politique à laquelle elle fait face depuis le sommet de La Baule en 1990.
Nous acteurs de la société civile, signataires du présent document, nous nous engageons à accompagner les autorités actuelles pour la réussite de leur programme qui restaurera enfin la dignité du peuple de Guinée.
Conakry, le 13 Septembre 2021
Ont signé
Liste des signataires
No |
Noms et Prénoms | Structure | Fonction |
Ismaël Kabacé SAMOURA | Plateforme nationale des Citoyens Unis pour le Développement (PCUD) | Président | |
Moussa Para DIALLO | Confédération des Organisations paysannes de Guinée (CNOP-G) | Président | |
Abdourahamane Adra DIALLO | Mouvement Guinée Libre (M.G.L) | Président | |
A . Amadou DS BAH | Organisation Guinéenne des Droits de l’Homme et du Citoyen (OGDH) | Vice-président | |
Maitre Hamidou Barry | Coalition Guinéenne pour Cour Pénale Internationale (CG-CPI) | Président | |
Bissiriou DIALLO | Consortium des Jeunes pour la Défense des Victimes de Violences en Guinée (COJEDEV) | Président | |
Mamadou Saliou DIALLO | ONSLG | Secrétaire Général | |
Thierno Mamadou Sow | Femme Développement et Droits Humains en Guinée (F2DHG) | Chargé des affaires extérieures et Partenariat | |
Lanfia IBN Mohamed Conde | CCEERFM (coordination des clubs d’écoute émission rétroviseur évasion FM ) | Président | |
Abdoulaye Melène TOURE | ROPACIDH | Chargé de la formation | |
Alpha Oumar DIALLO | Cellule de Veille Citoyenne (CVC) de Ratoma | Membre | |
Mamady ONIVOGUI | Elazologa | Coordinateur | |
Kalafa DAY | 3ème Dynamique | Coordinateur | |
Ehj Mamadou Malal DIALLO | Collectif CNT | Membre | |
Aboubacar SYLLA | Organisation Guinéenne des Droits et Devoirs du Citoyen (OGDDC) | Secrétaire Général | |
Alhousseine DIALLO | Collectif des victimes Kaporo rails 2019 | Chargé de la Collecte de fonds | |
Maître Frédéric FOROMO | Les Mêmes Droits pour Tous (MDT) | Président | |
Thierno DIALLO | Nouvelle Done | Chargé de communication | |
Daouda BAH | Fédération Estudiantine de Guinée (FEG) | Président | |
Ousmane BALDE | Esprit Citoyen | Communication | |
Thierno Siré BALDE | Bloc Positif | Coordinateur | |
Labilé Michel SOROMOU | Avocats Sans Frontières (ASF) | Membre | |
Cécé Kalas SAGNO | MAPAGUID | Coordinateur | |
M’bemba DIALLO | Case Rurale Guinée | Membre | |
Alpha Oumar Binta BALDE | AGUICOPS | Président | |
Ibrahima BALDE | DNAVIG | Membre | |
Aboubacar SOLOKOURE | Dynamique -58 |