Plusieurs projets d’investissement à fort impact socioéconomique sont actuellement en cours dans presque tous les secteurs économiques et dans toutes les régions du pays : infrastructures sanitaires, aéroportuaires, transports, énergie, agro-industrie, tourisme, habitat, culture, etc. Ces engagements contractuels, se chiffrant en milliards de dollars, constituent une aubaine pour les entreprises, qu’elles soient locales ou étrangères. Ce programme ambitieux, voire audacieux, pourrait repositionner la Guinée à l’échelle sous-régionale, à condition de garantir une gouvernance contractuelle rigoureuse, efficace et efficiente. Quelle approche de pilotage contractuel faut-il alors privilégier ?
L’approche traditionnelle du pilotage contractuel demeure profondément ancrée dans nos pratiques. Malheureusement, elle s’est révélée peu productive, marquée par une rigidité excessive et un manque de flexibilité. L’usage de serments religieux, comme nous avons pu l’observer récemment, repose certes sur la bonne foi des parties, mais reflète avant tout les préoccupations des autorités quant au respect des exigences de qualité et de délai.
Or, ces méthodes de gestion des contrats complexes posent des risques non négligeables, réduisant l’efficacité et la rentabilité des projets financés. Il n’est pas rare de constater que les contrats de grands projets d’investissement en Guinée ont souffert de lourdeurs administratives incompatibles avec les dynamiques enclenchées. Ces pratiques ont souvent entraîné des délais d’exécution excessivement longs, une capacité limitée à s’adapter aux imprévus, des surcoûts liés à des décisions tardives et des avenants alourdissant le budget initial.
Nous pouvons également remarquer que cette approche repose sur des clauses figées, dépourvues de mécanismes d’optimisation de l’exécution des projets. Elle ne prend généralement pas en compte les fluctuations du marché ni les imprévus techniques, limitant ainsi la marge de manœuvre des parties prenantes et provoquant des litiges fréquents, faute de dispositifs de réajustement efficaces. De plus, les sous-traitants ne sont pas systématiquement intégrés dans le pilotage global des contrats, accentuant ainsi les risques liés à l’exécution des projets. Qui ne se souvient pas de ces poses de première pierre annoncées en grande pompe pour des infrastructures qui n’ont jamais vu le jour ? C’est pourquoi, pour éviter les erreurs du passé et garantir l’adhésion des populations aux idéaux de développement prônés par les autorités de la transition, il est essentiel d’accorder une attention particulière au pilotage contractuel afin de maximiser l’impact des investissements.
Pour y parvenir, le pilotage agile et sécurisé de chaque contrat doit être privilégié, garantissant fluidité, transparence et pérennité des engagements pris. Ce mode de gestion permettrait de mieux maîtriser les risques grâce à l’introduction de clauses évolutives et d’outils de suivi précis : révision des prix, gestion proactive des risques, provisions pour imprévus, application stricte des pénalités de retard, etc. Chaque contrat étant unique, son pilotage doit être pleinement intégré à celui du projet qu’il encadre.
Une fois la signature actée par les parties, l’attention ne doit pas être exclusivement focalisée sur l’exécution technique et le respect des délais contractuels, mais aussi sur l’anticipation des risques potentiels au cours du cycle contractuel.
Ainsi, pour éviter les blocages, les retards et les désapprobations des populations directement impactées comme par le passé, un pilotage contractuel agile s’avère indispensable. Il doit reposer sur une flexibilité permettant une adaptation efficace aux imprévus, des clauses évolutives garantissant une optimisation des ressources et des délais, ainsi qu’un suivi contractuel détaillé, renforçant la confiance mutuelle et sécurisant les obligations.
En combinant l’action de l’Autorité de Contrôle des Grands Projets (ACGP) avec un pilotage contractuel agile et performant, la Guinée, comme l’ambitionnent ses autorités, impulsée par le Général Mamadi Doumbouya, pourrait faire du programme Simandou une référence sous-régionale en matière de gouvernance des investissements publics, assurant ainsi un développement rapide et durable du pays, tout en renforçant son attractivité stratégique.
Alpha Oumar CONDE
Project Contract manager