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L’aéroport Ahmed Sékou Touré, le PM et… le journaliste (Par Ibrahima S. Traoré)

« Je suis surpris, mécontent et dépassé. Je l’ai appris comme vous et comme tout le monde. Je n’ai ni été consulté ni été associé dans la prise de décision ». Ces propos largement diffusés dans la presse en fin de semaine dernière auraient, au détour d’un entretien informel, été tenus par Mohamed Béavogui, premier ministre de la transition.

C’était à propos du décret du colonel Mamadi Doumbouya qui a rebaptisé l’aéroport de Conakry en lui donnant le nom de Ahmed Sékou Touré, premier président de la Guinée.

A certains proches, le premier ministre aurait dit n’avoir pas sorti ces mots qui brouillent l’ambiance de farniente observée depuis le 5 septembre 2021, pour être diffusés dans la presse. Le problème est qu’il ne les nie pas publiquement, ce qui donne l’impression d’un certain malaise au sommet de l’état.

Il faut tout d’abord rappeler un précédent. Le 13 décembre dernier, contre toute attente et dans un communiqué, le CNRD a désavoué sèchement un premier ministre qui, à l’analyse des mots choisis par la junte militaire, aurait pris des engagements intenables devant la CEDEAO. Une véritable humiliation pour celui qui avait trop vite sablé le champagne, pensant avoir apaisé les relations entre la Guinée et l’organisation sous régionale.

Pendant que M. Beavogui ruminait ce camouflet, le colonel Doumbouya décide 3 jours plus tard de rebaptiser l’aéroport de Conakry Gbessia. Le premier ministre prend mal la décision surtout qu’elle a été prise, nous dit-on, de manière unilatérale.

Mais à supposer que cette conversation avec un chroniqueur des médias un peu trop euphorique se soit bien tenue, au mieux il aurait prouvé si besoin était qu’il a du mal à endosser son costume d’homme d’Etat, au pire il n’a pas eu le cran de dire vertement ce qu’il pense à celui qui, certes, l’a nommé, mais lui a bel et bien confié une mission précise.

Passons sur le geste incompréhensible du con-de-frère qui, dans un élan surréaliste, s’est permis de balancer sa source comme un feu d’artifice, ignorant allégrement les conséquences d’une telle erreur infantile dans ce métier qui a besoin de crédibilité.

Dire qu’il affirme urbi orbi que c’est le PM himself qui lui a demandé de donner l’information, comme si le chef du gouvernement avait besoin d’un ventriloque pour s’adresser au colonel Mamadi Doumbouya.

Au demeurant, si le premier ministre s’est offusqué parce qu’il n’a pas été associé à la prise d’une si délicate décision – donner le nom d’un édifice public à l’ancien président dont la seule évocation provoque des clivages au sein de la société guinéenne ! -, on ne peut pas dire qu’il a tort.

Le souci serait qu’il s’agite dans son costume parce que le nom a été donné à Sékou Touré. Parce que ne perdons pas de vue qu’il est le neveu de Diallo Telli (un fait ressassé dans son portrait post nomination), une des nombreuses victimes du régime Sékou Touré. Dès lors, ne devrait-il pas se mettre au-dessus de ce lien de parenté pour apprécier les actes en homme d’état ? Il est difficile pour Mohamed Béavogui de nier qu’il a agi sous émotion dès lors qu’on l’a vu verser des larmes au camp Boiro, en compagnie des membres de l’Association des victimes de la sinistre prison où son oncle et beaucoup d’autres Guinéens ont péri dans des conditions inhumaines.

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