Mobilisation des recettes : le CNT identifie de nouvelles niches explorables pour renflouer les caisses de l’État 

Les premières estimations liées aux conséquences économiques de l’incendie du dépôt central d’hydrocarbures de Conakry révèlent un manque à gagner de près de 8 000 milliards GNF soit 29,72% des recettes fiscales y compris le budget d’affectation spécial( BAS) dans le projet PLF 2024. 

 

Pour faire face à ce déficit préjudiciable à la dynamique de développement enclenchée par le CNRD sous clairvoyance du Président de la République, Colonel Mamadi DOUMBOUYA, le Conseil National de la Transition grâce à la vigilance de ses membres, a identifié des niches de recettes dormantes. Parmi les entités ciblées, figurent plusieurs sociétés minières exemptées par l’ancien régime, du payement de certaines taxes minières sur plusieurs années. Un passif qui obère les caisses de l’État.

 

A la faveur de l’adoption du volet recettes du projet de loi de finances initiale 2024, la représentation nationale sous le leadership de son Président Dr Dansa KOUROUMA, a fait de pertinentes recommandations au Gouvernement susceptibles d’amortir voire même, juguler les effets économiques du drame de Kaloum.

 

Il s’agit :

1- Au regard des besoins croissants en ressources de financement, le CNT encourage le Gouvernement, à travers le Ministère en charge des finances, pour les démarches entreprises dans le cadre de l’identification de nouvelles niches de recettes. A cet effet, il l’invite à lui fournir la liste exhaustive desdites niches avant la LFR 2024.

2- Le CNT constate que la recommandation relative au versement au trésor public des recettes issues des contraventions liées au mauvais stationnement des véhicules, n’a pas

été prise en compte. Etant donné que ces recettes ne sont pas versées au trésor, le CNT invite le Gouvernement (Ministère en charge des Finances, Ministère de la Sécurité et de la Protection Civile et le Ministre en charge de l’administration du territoire) à suspendre cette activité en attendant la mise en place d’une réglementation permettant le versement desdites recettes dans les comptes du trésor.

3- Le CNT constate le faible taux de rétrocession des ressources destinées aux collectivités locales à travers l’ANAFIC. Cette situation n’est pas liée qu’au trésor, mais aussi et surtout au faible niveau d’absorption des ressources mises à disposition. L’ANAFIC n’ayant pas à date de Conseil d’Administration, le CNT invite le Gouvernement à sa mise en place dans les meilleurs délais. Cela permettrait d’améliorer sa capacité d’absorption et, par ricochet, impacter positivement les populations à la base. En attendant la mise en place des CA, le CNT invite le gouvernement à faire valider le

budget de l’ANAFIC et de tous les EPA n’ayant pas de CA, par le Ministère de

l’économie et des finances.

 

4- Au regard des efforts de mobilisation fournis par la LONAGUI, en termes de dividende, le CNT l’invite à poursuivre ses actions dans ce sens.

5- Le CNT s’est impliqué, à travers sa ‘’commission du plan, des affaires financières et du contrôle budgétaire’’, dans la médiation entre les structures de jeux et l’administration fiscale, en vue de l’application de l’article 513 du code général des impôts, relatifs à la taxe sur les jeux de hasard. A cet effet, il invite les entreprises de jeux au respect scrupuleux des dispositions dudit article. A noter que l’application de cette disposition permettra de rehausser les prévisions de recettes à plus de 250 Mds.

6- Dans le souci d’améliorer le niveau de mobilisation et la sécurisation des recettes fiscales et douanières, le CNT invite le Gouvernement à accélérer le processus de mise en œuvre de la facturation électronique par l’administration fiscale et la

dématérialisation des paiements douanières à l’intérieur du pays.

 

7- Le CNT constate que l’intensification des activités minières n’est pas proportionnelle à la mobilisation des ressources y afférentes. Cet état de fait est dû à la non transformation

des matières premières sur place, d’une part, et aux exonérations fiscales surréalistes d’autres part ; ce qui compromet les intérêts de l’Etat. À titre illustratif :

 La SAG bénéficie d’un congé fiscal de 2020 jusqu’à 2025 et est exonérée des impôts

et taxes suivants : La Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), l’Impôt Minimum

Forfaitaire (IMF), l’Impôt sur les sociétés (IS), les Droits d’Enregistrement (DE), la

Patente, la Retenue sur loyers et la Taxe d’Apprentissage (TA). Cela entraine un

manque à gagner estimé à 332 ,56 Mds GNF par an ;

GAC est exonéré des impôts et taxes suivants :

La Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), l’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), l’Impôt

sur les sociétés (BIC). Soit un manque à gagner estimé à 19, 66 Mds FG par an ;

 La SPIC est exonérée des impôts et taxes suivants :

La taxe sur la valeur ajoutée (TVA), l’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), l’Impôt sur

les sociétés (IS), CFU, IRVM, la Patente, la Taxe d’Apprentissage (TA).

Soit un manque-à-gagner estimé à 94, 55 Mds GNF par an ;

 La SOCIETE MINIERE DE MANDIANA est exonérée des impôts et taxes suivants :

La taxe sur la valeur (TVA), l’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), l’Impôt sur les

sociétés (IS) et la Taxe d’Apprentissage (TA) ;

Soit un manque-à-gagner estimé à 93 ,93 Mds GNF par an ;

 La SMB est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ;

soit un manque-à-gagner estimé à 790 ,61 Mds GNF par an ;

 WINNING CONSORSIUM RAILWAY GUINEA SAU est exonérée des impôts et

Taxes suivants :

La taxe sur la valeur ajoutée (TVA), l’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), l’Impôt sur

les sociétés (IS) congé fiscal de 25 ans, la Patente, la Taxe d’Apprentissage (TA).

Le manque-à-gagner par an est estimé à 238 ,73 Mds GNF ;

 La société KOUROUSSA GOLD MINING est exonérée de la taxe sur la valeur

ajoutée (TVA). Le manque-à-gagner par an est estimé à 94 ,014 Mds GNF ;

 La Société Minière de Dinguiraye (SMD) est exonérée de la TVA, Retenue sur

Loyers, la Taxe d’Apprentissage (TA).

Le manque-à-gagner par an est estimé à 156 ,96 Mds GNF ;

 

 

Il ressort de ces 8 exemples seulement, un manque-à-gagner par an de 1915,6 Mds de GNF sur les recettes minières, au compte de la Direction Générale des Impôts.

Quant à la Direction Générale des Douanes, le manque à gagner par an est estimé à 6 064,41

Mds GNF dont :

 536,38 Mds au titre du régime dérogatoire du code minier,

 1 610,26 Mds au titre des conventions particulières,

 3 905,50 Mds au titre des protocoles, accords et conventions et

 12,27 Mds au titre des exonérations exceptionnelles et conditionnelles.

 

À la lumière de ce qui précède et nonobstant l’Ordonnance O/2021 /001 /PRG/CNRD/SGG du 16 septembre 2021, portant prorogation des Lois Nationales, des Conventions, Traités et Accords Internationaux en vigueur à la date du 05 septembre 2021, le CNT attire l’attention du Chef de l’État sur la nécessité de la révision de ces conventions qui sont défavorables au

développement du pays, et compromettantes pour l’avenir des futures générations. Il le rassure

de son soutien total dans cette démarche.

 

8- Le CNT réitère son inquiétude face à l’accroissement du volume des importations de poussins

d’un jour alors que le secteur privé a énormément investi pour répondre au besoin du marché.

Par conséquent, il recommande la taxation de leur importation, dans les mêmes conditions que les œufs de consommation et les carcasses de poulets congelés, en vue d’encourager la production locale et lutter contre la concurrence déloyale ;

9- Le CNT invite le Gouvernement à s’acquitter de la contrepartie guinéenne évaluée à un million cinq cent mille dollar US au titre du projet PRODEIC (Diplomatie économique), pour bénéficier d’un financement de 17 Millions d’euros ;

10- Le CNT invite le Gouvernement, à travers le ministère des affaires étrangères, à organiser un

Forum de la Diaspora pour identifier et évaluer les possibilités de financement de l’économie

guinéenne ;

11- Pour financer la construction des infrastructures artisanales et promouvoir la compétitivité des produits artisanaux « Made in Guinée », le CNT invite le Gouvernement à envisager la création

d’une taxe de développement artisanal (TDSA). Le taux et la base d’imposition, les modalités de collecte et de rétrocession peuvent être précisés dans les projets de lois de finances rectificatif 2024. Il peut être aussi envisagé la création d’une autre taxe pour soutenir l’Industrie Cinématographique et de la Production Audiovisuelle (TDICA) ;

12- Le CNT constate avec satisfaction les efforts réalisés par le Gouvernement dans le cadre de la mobilisation des dividendes payées par les sociétés assujetties.

Toutefois, il ressort de nos analyses, à partir du tableau de bord de la direction du portefeuille, que sur 47 sociétés, 13 sont à l’arrêt, 16 déficitaires, 6 en cours de création, 2 ont payé, 8 n’ont pas payé et 2 ont partiellement payé.

 

Au regard de cette situation, le CNT invite le Gouvernement à mettre tout en œuvre pour :

 Recouvrer les dividendes des sociétés qui n’ont rien payé au compte de l’exercice 2022 à savoir : SOGEKA, SONAPI, Bel Air Mining, Alliance Mining Commodites, Alliance Mining Responsable, Société Minière de Boké, Société de distribution des chaines de télé ;

 Prendre des mesures fermes pour redresser, privatiser ou fermer si nécessaire celles qui, depuis 5 ans, exercent à perte.

 

L’incendie de l’entrepôt d’hydrocarbures de Kaloum aura un impact sur les recettes non fiscales. Le CNT, en accord avec le Ministère du Budget, a revu à la baisse les recettes

budgétaires suivantes :

A la Direction Générale du Trésor :

a) Redevances de Pêches : étant tributaire de la consommation de carburant, l’indisponibilité de ce dernier affectera sans doute le secteur de la pêche industrielle et artisanale, d’où la

revue à la baisse de cette redevance de 15,39 Mds.

b) La Demande Descriptive d’Importation et la Demande Descriptive à l’Exportation (DDI￾DDE) : la délivrance des DDI-DDE étant directement arrimé au volume des importations et exportations, une pénurie de carburant réduirait leurs fréquences. D’où la baisse de 33

Mds sur cette ligne.

c) Les Dividendes : En tant qu’actrices majeures du secteur pétrolier, la Société Guinéenne de Pétrole (SGP) dont l’Etat est actionnaire à 16% et la Société Guinéenne de Lubrifiant et d’Emballage (SOGUILUBE) détenue à 30 % sont profondément impactées. Par conséquent, le versement des dividendes par elles s’en trouve compromis. D’où, une baisse de 4 Mds. Quant à la SOGEKA et la SOGES, hormis les impacts de cette crise, elles sont depuis un certain temps en défaut de paiement effectif de dividendes dû au non

règlement de leurs factures par l’Etat. Par conséquent, les projections de dividendes de la SOGES ont été maintenues à leurs valeurs initiales et celles de la SOGEKA ont été drastiquement revues à la baisse pour 154,30 Mds.

 

Ainsi, la projection de recettes du Trésor se trouve revue à la baisse pour 206,71 Mds soit 7,5% de sa prévision initiale. A la Direction générale des douanes

 TVA sur les produits pétroliers : elle était estimée à 1 376,78 GNF le litre pour une

projection de 851,31 Mds de GNF en PLFI 2024. Si l’approvisionnement se faisait à

partir du dépôt de Conakry. Elle se chiffrerait à 0 GNF pour un approvisionnement à partir de la Sierra Leone. Soit un manque à gagner de 100% sur chaque litre, selon la DGD. Toutefois, une estimation de 761,68 Mds GNF est retenue pour tenir compte de

l’opérationnalisation des entrepôts restants qui ont une plus grande capacité;

 Taxe Spécifique sur les Produits Pétroliers : elle était estimée à 169,56 de GNF le litre pour une projection de 310 Mds de GNF en PLFI 2024 si l’approvisionnement se faisait

à partir du dépôt de Conakry. Elle se chiffrerait à 0 de GNF pour un approvisionnement à partir de la Sierra Leone selon la DGD. Pour la même raison qu’au point précédent, il est retenu un montant de 217 Mds GNF pour cette taxe ;

 Redevance Entretien Routier : elle était estimée à 492,90 GNF le litre pour une

projection de 549,95 Mds de GNF en PLFI 2024 si l’approvisionnement se faisait à

partir du dépôt de Conakry. Elle se chiffrerait à 500 GNF pour un approvisionnement à partir de la Sierra Leone soit 557,87 Mds de GNF équivalent à une plus-value de 7

Mds.

 Droit Fiscal à L’Importation : elle était estimée à 1218,60 GNF le litre pour une

projection de 737,73 Mds de GNF en PLFI 2024 si l’approvisionnement se faisait à

partir du dépôt de Conakry. Elle se chiffrerait à 833,36 GNF pour un

approvisionnement à partir de la Sierra Leone. Il est retenu 667,77 Mds GNF ;

 Taxe d’Entreposage : elle était estimée à 0 GNF pour cette période, sans cuves de

stockage, il n’y a pas de perception de Taxe d’Entreposage ;

 Redevance Traitement Liquidation : elle était estimée à 121,86 GNF le litre pour une projection de 479,37 Mds de GNF en PLFI 2024 si l’approvisionnement se faisait à partir du dépôt de Conakry. Elle se chiffrerait à 130,39 GNF pour un

approvisionnement à partir de la Sierra Leone, équivalent à une plus-value de 33,55

Mds.

 

La base de cette analyse est la structure des prix du 22 Décembre 2023, le sens de l’analyse pourrait modifier en fonction des changements qui interviendront dès la fixation d’une nouvelle structure des prix. Ainsi, le CNT propose une baisse de 489,40 Mds GNF au lieu de 1 631,33

Mds GNF estimée par la Direction Générale des Douanes.

Boubacar Koyla DIALLO