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Quel est le bilan de Joe Biden après 100 jours à la Maison Blanche ?

Joe Biden a prononcé mercredi son premier discours de politique générale devant le Congrès. L’occasion de revenir sur ce début de mandat mené tambour battant, marqué par une gestion exemplaire de la pandémie de Covid-19 et un retour vigoureux des États-Unis sur la scène internationale.

On le disait vieillissant. Joe Biden se montre énergique et discipliné. On le disait hésitant. Il gouverne vite et fort. En 100 jours, le nouveau président des États-Unis a surpris ses détracteurs et les sceptiques en offrant l’image d’un chef d’État déterminé à combattre la pandémie de Covid-19, à replacer la première puissance mondiale au cœur du jeu diplomatique, à s’attaquer aux vieux démons de l’Amérique.

« Il a été complètement sous-estimé », confirme Jean-Éric Branaa, spécialiste des États-Unis et auteur d’une biographie de Joe Biden. « C’est sans doute parce qu’il a passé sa carrière à jouer les seconds rôles. En réalité, il est sérieux, travailleur, on le voit bien maintenant, même s’il n’a jamais cherché à prendre la lumière. »

 

Sans drame, ni scandale, ce président « normal » prend soin depuis le début de son mandat d’effacer l’héritage de Donald Trump. Politique migratoire, environnement, santé, minorités… Une semaine après sa prise de fonction, Joe Biden signe 34 décrets, dont 12 reviennent sur des décisions de son prédécesseur.

Parmi ces mesures controversées, le « Muslim ban » qui interdisait l’accès au territoire américain à des ressortissants de sept pays à majorité musulmane, ou encore un décret qui favorisait les discriminations à l’encontre des employés LGBT.

Aux tweets tonitruants du milliardaire, Biden mise sur une communication discrète. Aux coups de colère, « Joe » préfère jouer sur le registre de l’empathie et de la compassion, comme lorsqu’il se rend au Texas pour réconforter les victimes d’une vague de froid qui a paralysé l’État pendant plusieurs jours au mois de février.

« On est passé du perturbateur au fond de la classe qui amuse tout le monde, au bon élève qui travaille en silence », résume Jean-Éric Branaa.

Et c’est sur le front sanitaire que le nouveau président a travaillé dur. Très dur. Quand il arrive à la Maison Blanche, les États-Unis viennent de passer le cap des 400 000 morts du Covid-19. Joe Biden prend alors le contre-pied total de l’administration Trump, impose le port du masque dans les bâtiments fédéraux, une quarantaine aux voyageurs et lance l’opération de vaccination la plus ambitieuse de l’histoire des États-Unis. En somme, Joe Biden écoute la science, au grand soulagement de l’immunologue et conseiller des présidents américains, Anthony Fauci.

Quelques semaines plus tard, les résultats sont là. Le pays connaît un reflux spectaculaire du nombre de contaminations. La campagne de vaccination est un succès logistique considérable. Elle dépasse même les objectifs fixés par Joe Biden, qui avait promis 100 millions de vaccinés en 100 jours. Aujourd’hui, plus de 210 millions de doses ont été administrées, un record dans le monde.

Loin de son étiquette de gestionnaire, il réussi également l’exploit de faire adopter en quelques semaines par le Congrès son ambitieux plan de relance de 1 900 milliards de dollars, et en propose dans la foulée un autre sur les infrastructures. Relance massive, intervention de l’État fédéral : certains admirateurs n’hésitent plus à en faire l’héritier de Franklin Roosevelt, le bâtisseur du New Deal après la Grande Dépression.

Sa cote de popularité est désormais solidement ancrée au-delà des 50 %, un score que n’a jamais atteint son prédécesseur durant les quatre années de sa présidence.

« America is back »

Au chapitre des relations internationales, Joe Biden, reconnu comme un expert en la matière, fait là encore l’inverse de Donald Trump. Dès son investiture, il revient au multilatéralisme en annonçant le retour des États-Unis dans l’accord de Paris sur le climat, au sein de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) ou encore du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU.

En 100 jours, le nouveau locataire de la Maison Blanche a remis les États-Unis au centre du monde. « America is back », l’Amérique est de retour, martèle Joe Biden.

« Il n’a pas fait que revenir au sein du concert des nations. Il s’est assis au premier rang et a dit tout le monde : ‘Désormais, c’est moi le chef' », analyse Jean-Éric Branaa. Sur le climat, il a court-circuité les autres, et notamment Emmanuel Macron, en organisant son sommet virtuel » la semaine dernière.

Le nouveau président américain opère également d’importants virages diplomatiques en mettant fin au soutien américain à la coalition saoudienne au Yémen ou encore en relançant les négociations sur le nucléaire iranien. Il donne également son feu vert à la reprise de l’aide économique aux Palestiniens interrompu par son prédécesseur. En Afghanistan, il prend la décision controversée d’un retrait des troupes américaines mettant « fin à la plus longue guerre de l’Amérique ».

Face aux ambitions de Vladimir Poutine, qualifié de « tueur », de Xi Jinping, qui « n’a pas une once de démocratie en lui », ou encore de Recep Tayyip Erdogan, Biden se montre intraitable.

Mais au-delà des formules qui font mouche, le duo Biden-Harris prend des mesures concrètes en imposant d’importantes sanctions contre la Russie pour son ingérence dans le processus électoral et dans la cybersécurité américaine.

Le 24 avril, les États-Unis ont reconnu officiellement le génocide arménien, provoquant la fureur d’Ankara. Aucun de ses prédécesseurs n’avait osé, craignant la vive réaction de la Turquie. Même fermeté à l’égard de la Chine pour son comportement vis-à-vis de Hong Kong, Taïwan et la minorité ouïghoure.

« Les droits de l’Homme sont revenus au centre du jeu diplomatique alors qu’ils avaient disparus depuis quatre ans. Comme ce n’était pas l’affaire de Donald Trump, ce n’était plus l’affaire du monde. Si on parle des Ouïghours aujourd’hui, c’est parce que Biden a remis cette question sur le devant de la scène », assure Jean-Éric Branaa.

Réconcilier l’Amérique

Si les 100 premiers jours de la présidence Biden ont été accaparés par la gestion de la pandémie de Covid-19, d’autres dossiers attendent dans le Bureau ovale. À commencer par l’épineux sujet du racisme et des violences policières.

Dès le début de son mandat, Joe Biden a signé une série de décrets pour lutter contre les discriminations. Un premier pas jugé insuffisant par la communauté afro-américaine et les défenseurs des Droits de l’Homme.

Après le verdict dans l’affaire de la mort de George Floyd et la condamnation du policier Derek Chauvin, le président américain a promis d' »en faire beaucoup plus » contre le « racisme systémique » aux États-Unis. Un projet de loi pour réformer la police sera bientôt présenté au Congrès.

Après les tueries de masse d’Atlanta, de Boulder, dans le Colorado, et d’Orange, en Californie, Joe Biden s’est aussi attaqué au problème récurrent de la circulation des armes à feu. Mais faute de véritable marge de manœuvre au Congrès, Biden doit renoncer à des réformes d’envergure et se contenter de décrets exécutifs à la portée limitée.

Autre dossier brûlant qui pourrait ternir les débuts prometteurs du locataire de la Maison Blanche : l’immigration. À la mi-avril, Joe Biden a annoncé retarder son projet d’une augmentation du nombre de réfugiés admis aux États-Unis et conserver cette année le plafond historiquement bas de 15 000 personnes fixé par Donald Trump. Face au tollé provoqué au sein de l’aile progressiste du parti démocrate, le gouvernement a fait finalement machine arrière.

« Biden a promis d’accueillir les immigrés, et les gens ont voté pour lui sur la base de cette promesse. Conserver les politiques xénophobes et racistes de l’administration Trump » est « tout simplement mal », avait notamment protesté sur Twitter, l’égérie de l’aile gauche du parti démocrate, Alexandria Ocasio-Cortez.

FRANCE24

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