Cultivé à l’école informelle des vieux briscards qui ont voué la moitié de leur vie à la chose politique, à savoir, Alpha Condé, Bah Mamadou, Jean -Marie Doré et Siradio Diallo. Sidya Touré est un authentique produit politique fini. Du stade de l’apprenant, le voici transformé en véritable gourou dans la silhouette de l’opposition guinéenne. Tandis que, lui-même est aujourd’hui, à la tête d’un parti politique à la santé politique précaire mais pas grégaire.
Manifestement, le seul cours qu’il semble mal appris, c’est la constance et, bien appris c’est l’inconstance. Parce que les intérêts politiques, eux-mêmes, sont dynamiques, ils contraignent d’être amovible. Au risque de demeurer cloué au quai, voisiné par des appréhensions. A part ce constat, il a ingurgité presque tous les autres cours qu’il expérimente commodément, dans un laboratoire politique où son stagiaire Cellou Dalein peine à réclamer son autogestion, en dépit de la durée du stage.
Sinon, comment un parti politique comme l’Union de Forces Démocratiques de Guinée (UFDG) ,deuxième force politique avérée du pays, puisse sombrer dans le piège du boycott d’une élection si importante ? Surtout, à un moment où le parti l’UFDG a le vent en poupe. Avec un parcourt incomparable à sa solidité actuelle sur la scène politique. Étant donné qu’il a connu une ascension singulière, grâce à son organisation, la constance et l’aplomb de ses militants, toujours gratifiés par des résultats électoraux avantageux. Même l’alibi du mauvais fichier électoral avancé, ne pourrait acquitter son boycott. D’autant plus que c’est ce fichier revisé qui a servi à toutes les élections précédentes auxquelles l’UFDG a pris part.
Nul doute, le patron de l’UFDG, Mamadou Cellou Dalein Diallo à l’état civil, reste cette convenable proie de la malignité politique de Sidya Touré, qui en plus, a le don de connaitre son stagiaire politique et, continue sans répit de profiter délicatement de lui.
Pour s’en rendre compte, il suffit de remonter au deuxième tour de la présidentielle 2010. Sidya Touré arrivé troisième au premier tour a rejoint Cellou Dalein qui, était arrivé premier au premier tour, pour des raisons que le public ne saura jamais. Cependant, le malheur de cette alliance politique à l’époque, avait été imputé au manque d’engament de Sidya Touré. « Il n’a pas mouillé le maillot » disait-on.
De 2010 aux élections législatives de 2013, Sidya Touré en parfait politique, devient l’idéologue qui distille au sein de l’opposition, l’idée qu’il connait mieux que quiconque Alpha Condé pour avoir été avec lui dans l’opposition. Donc, lui seul est capable de lire et de traduire les faits et gestes du Président Alpha Condé. La première stratégie qu’il va réussir à enseigner à l’opposition, ce sont les rapports de force , à travers les manifestations de rue. N’hésitant pas à s’afficher sur les capots des véhicules lors des manifestations, à coté de Cellou Dalein qui ignorait tout de ses visées législatives.
L’ancien premier ministre Guinéen de 1996 à 1999, Sidya Touré utilise le candide Cellou Dalein à travers une alliance électorale qui lui permet de s’offrir des sièges à l’Assemblée nationale, avant de jurer : « vous ne me verrez plus sur le capot d’une voiture.»
En 2015, pendant les campagnes présidentielles, le candidat de l’UFR , Sidya Touré a bâti tous ses discours sur la critique du bilan du Président sortant, Alpha Condé. D’ailleurs, on se ressouvient de son fameux clip de campagne qui se couronnait par « nous sommes fatigués ! » Dans cette expression, Cellou Dalein ne saisissait pas que, Sidya Touré voulait copieusement dire que lui et ses militants étaient éreintés d’inhaler l’air de l’opposition. Jusqu’au jour où le monde a vu, ahuri, à la télévision nationale, Alpha Condé réélu, et le rusé Sidya Touré, bras dessus bras dessous, étreints et le tout revalorisé par une atmosphère de joie. Alors que lui, Cellou Dalein parvenait péniblement à encaisser le coup KO administré et, dont la douleur perceptible subsistait encore. Cerise sur le gâteau, Sidya Touré est canonné haut représentant du chef de l’Etat et, son parti l’Union des Forces Républicaines(UFR) fait son entrée au gouvernement.
Vraisemblablement, Cellou Dalein n’a pas vu cet autre piège du boycott.
Reniflant le parfum de son rapetissement politique, Sidya Touré décide habilement d’empêcher le principal parti politique de l’opposition d’avoir des Députés, pour rejoindre le seul espace institutionnel de débats et de contrôle de l’action gouvernementale.
A la tête de l’UFR depuis les années 2000, impuissant, Sidya Touré a toujours assisté aux démissions des cadres de son parti. Certains accuseront son orgueil, d’autres son égo surdimensionné et son ignorance absolue dans la gestion humaine. C’est ainsi, nonobstant les cas anciens (Ousmane Kaba,Makalé Traoré ,Maitre Maurice Zogbélémou etc.), que les départs de Baydi Aribot ancien Député de la Commune de Kaloum, Ibrahima Deen Député de Matam et Mohamed Lamine Doumbouya Député de Matoto ont profusément désagrégé son électorat dans la capitale. Ces trois communes de la capitale, qu’il est dorénavant entendu d’appeler ancestraux fiefs, le parti de Sidya Touré ne peut plus ambitionner y gagner une seule élection.
Egalement, de 2010 à nos jours, ses options politiques qui ont l’air d’être le fruit de l’unilatéralisme, ont fait décamper abondamment de militants et sympathisants de l’UFR. Notamment, sa position politique mi-opposition mi-mouvance et non centriste font que, Sidya Touré moissonne les effets à chaque joute électorale. 13% à la présidentielle de 2010,7% présidentielle de 2015 soit presque la moitié de ses électeurs qui ont signé le divorce.
De même, au vu des résultats des dernières communales, qui alignent son parti loin derrière le RPG-Arc-en-ciel et l’UFDG, Sidya Touré ne pouvait opter que pour le boycott des législatives, pour esquiver une évidente humiliation électorale. Mais persuadé aussi que, le boycott de lui seul n’aurait eu aucun impact, il faut charrier l’apprenti politique, Cellou Dalein et son parti dans ce sillage dépossédant.
Le piège lui-même.
Pour réussir à prendre Cellou Dalein à son piège, il désiste à son poste de haut représentant du chef de l’Etat et fait limoger son ministre. Ensuite, il change de discours et de ton au crépuscule contre le pouvoir qu’il servait le matin. Comme pour s’attirer la crédulité de Cellou Dalein qu’il revient dans la vraie opposition. Alors, lui Cellou Dalein ondulait en pleine difficulté de gestion des partis alliés, qui l’isolent chaque jour, voit naïvement une occasion de renouer avec son maitre, Sidya Touré.
Plus tard, Sidya Touré coopère à la gestation du front national pour la défense de la constitution (FNDC). Au FNDC, contre toute attente, il remonte sur le capot de sa voiture, pas pour reprendre la rue qui mène aux législatives, mais au piège du boycott avec Cellou Dalein.
Quoi de plus légitime, sur un terrain comme celui de la politique où il n’y a pas de pitié ? Allez-y le savoir !
Bella KAMANO, Journaliste et Analyste politique.